En août 1893, Aigues-Mortes devient le théâtre d’un tragique événement lié à la rivalité entre ouvriers français et italiens travaillant dans les salins de Peccais. Comme chaque année, des milliers d'ouvriers affluent, notamment de Cévennes, d'Ardèche et d'Italie (Piémont, Ligurie, Toscane), pour la saison du sel. Parmi eux, environ 1000 Italiens se trouvent dans la région, souvent plus disposés à accepter les difficiles conditions de travail et les faibles salaires, ce qui provoque des tensions avec les travailleurs français.
Le 16 août 1893, ces tensions éclatent en violentes querelles sur les chantiers, exacerbées par de fausses rumeurs prétendant que des ouvriers français ont été tués par des Italiens. En réalité, quelques Français n'avaient été que légèrement blessés. La situation se dégrade rapidement, une foule furieuse à Aigues-Mortes commence une véritable "chasse à l'Italien". Une cinquantaine d'ouvriers italiens se réfugient dans une boulangerie, d'autres dans la caserne, mais les forces de l'ordre locales sont débordées. Une demande de renforts est envoyée à Nîmes, mais malgré leur arrivée, ils sont incapables de contrôler la situation.
Le lendemain, une foule armée envahit les salins où se trouvent environ 350 ouvriers italiens sous la protection des gendarmes. Malgré cette protection, de nombreux Italiens sont massacrés, certains tentant désespérément de fuir sont pourchassés et battus à mort. Finalement, les survivants restants sont conduits dans la Tour de Constance pour échapper à la violence. Cependant, les attaques continuent toute la journée, la population pourchassant et éliminant les Italiens cachés.
Ce n’est que le soir, avec l’arrivée d’un détachement d’artilleurs, que les derniers Italiens réfugiés dans la boulangerie et la Tour de Constance sont sauvés et évacués en gare. Le bilan officiel fait état de 10 morts et 50 blessés parmi les Italiens, bien que certains suggèrent que le nombre de victimes ait pu être plus élevé.
Les morts incluent Torchio Secondo (24 ans), Calori Bartolomeo (26 ans), Merlo Giuseppe (29 ans), Zanetti Paolo (29 ans), Caffaro Vittorio (29 ans), Bonetto Giovanni (31 ans), Rolando Lorenzo (31 ans), Caponi Amaddio (35 ans), Tasso Carlo (58 ans) et un homme non identifié.
Le lendemain du massacre, le maire d’Aigues-Mortes publie une proclamation controversée, justifiant partiellement les actions des émeutiers. Cette prise de position déclenche une vive réaction dans la presse internationale, forçant le gouvernement à le contraindre à démissionner. Cet épisode, marqué par la violence et la xénophobie, reste l'un des plus tragiques de l'histoire de l'émigration italienne en France.
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30220 AIGUES-MORTES